jeudi 13 octobre 2011

Quatre types d'activités innovantes

Comment être innovant ? Y a-t-il une méthode, ou est-ce inné et réservé à des personnes de la trempe d'un Steve Jobs ?
Questions importantes, car si les économistes depuis Schumpeter font de l'innovation le moteur de la croissance, l'innovation semble assez éloignée des préoccupations de la plupart des entreprises. L'optimisation des coûts et des procédures est une activité bien plus courante, mais qui dans le fond ne crée pas de valeur.
Il y a en fait plusieurs manières d'être innovant.

Innovation méthodique contre innovation spontanée

Une première manière de catégoriser l'activité innovante réside dans la démarche : est-ce qu'on utilise une méthode ou est-ce qu'on attend qu'un événement offre une occasion d'innover ?
Car il existe des méthodes pour innover. Ainsi, la méthode TRIZ permet d'obtenir des solutions innovantes à un problème technologique.

TRIZ ou la théorie de la résolution inventive des problèmes
Peu après la seconde guerre mondiale, l'ingénieur soviétique Genrich Altshuller s'est intéressé à la manière dont les inventions naissaient.
Il découvrit par l'analyse de milliers de brevets que les inventions techniques peuvent être classées en catégories d'inventions basées sur une idée similaire, qu'il a qualifiées de principes d'innovation.
De plus, il observa que ces idées permettaient la résolution d'une contradiction entre deux objectifs souhaités par l'utilisateur et qui évoluent généralement dans un sens opposé. Par exemple, un instrument de mesure capable de mesurer précisément une valeur est souvent incapable de mesurer des évolutions rapides de cette valeur. La réactivité et la précision sont des variables contradictoires.
Il a donc identifié 40 principes d'innovations, et 39 variables pouvant être en contradiction l'une avec l'autre. Cela conduit à construire une matrice de contradictions de 39x39 contradictions possibles entre deux variables, dans laquelle on peut placer un ou plusieurs des 40 principes d'innovations permettant de résoudre la contradiction. Voir ce lien.
Ainsi est né une méthode, qu'on pourrait simplifier à l'extrême sous la forme suivante : 
  • identifier la contradiction dans un problème technique, 
  • chercher dans la matrice quels principes d'innovation peuvent résoudre cette contradiction,
  • et appliquer ces principes pour trouver une solution innovante.
La méthode TRIZ est bien plus riche, mais cette recette résume le cœur de la méthode.

Plus généralement, les ingénieurs appliquent un tas d'outils pour innover technologiquement : plans d'expérience, simulations numériques, observations expérimentales... Le brainstorming et autres techniques de créativité permettent d'obtenir des idées plus efficacement. Les marketeurs ont l'habitude de lancer des études de marché et de tester des idées auprès de leurs clients. Les chefs de projets peuvent utiliser des méthodes comme Stage-Gate pour gérer les projets innovants.
On peut donc innover et être méthodique.
Mais on peut aussi innover sans faire appel à une méthode en tant que telle. En effet, une idée innovante peut parfaitement surgir à un moment inattendu : en se rasant, en jouant au football, lors d'un dîner... On parle de sérendipité quand on trouve quelque chose qu'on ne cherchait pas.
Tout l'art de l'innovateur est d'être attentif à l'idée ou à la solution qui se présente sous nos yeux. Comme me le disait un ancien collègue, on n'est pas à l'abri d'un coup de bol !

Innovation fermée ou ouverte

L'autre axe de catégorisation de l'innovation est l'ouverture à l'extérieur. On peut parfaitement innover sans s'ouvrir à l'extérieur. Les profils créatifs sont d'ailleurs recrutés pour leur aptitude à avoir seuls des idées ou des solutions innovantes. Beaucoup de grandes inventions ont été réalisées dans un garage par un nombre limité de développeurs.
Mais il y a aussi moyen d'innover grâce à des échanges avec l'extérieur. Je ne vais pas refaire l'apologie de l'innovation ouverte, mais une icône de l'innovation comme Edison s'est servi abondamment de technologies existant ailleurs pour développer ses inventions.
La médiation technique est d'ailleurs un avatar de l'innovation ouverte.

Quatre types d'activités innovantes

Les deux axes que l'on a décrit permettent de concevoir par combinaison 4 types d'activités innovantes :
  • l'innovation méthodique et fermée, ou innovation altshullérienne en hommage à l'inventeur de TRIZ,
  • l'innovation méthodique et ouverte, ou innovation edisonienne en hommage à l'innovateur aux mille brevets,
  • l'innovation spontanée et fermée, ou innovation archimédienne en hommage à Archimède et à son fameux "eurêka",
  • et l'innovation spontanée et ouverte, ou innovation colombienne en hommage au découvreur de l'Amérique.
Chaque activité met en jeu des compétences propres : méthode et raison pour l'innovation altshullérienne, veille et essais pour l'innovation edisonienne, réflexion et observation pour l'innovation archimédienne, déplacement et relationnel pour l'innovation colombienne.
Une entreprise qui innove fortement ne choisit pas l'une de ces activités, mais les pratique probablement toutes, certains employés étant plus enclins à l'une ou l'autre de ces activités.
Il est dommage que beaucoup d'industries ne comptent que sur l'innovation altshullérienne pour innover. La médiation technique leur ouvre au moins les portes de l'innovation edisonienne.

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